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Catherine Bissey, chercheuse en management : « Les très petites entreprises sont bien souvent les oubliées de la formation professionnelle »

Depuis septembre 2018, les salariés français ont la possibilité légale de se former « en situation de travail », c’est-à-dire au sein de leur entreprise, à leur poste. Ce qu’on appelait « formation sur le tas » peut désormais être reconnu et bénéficier des fonds dédiés à la formation professionnelle, voire déboucher sur une certification. Cette loi – et c’est dommage – reste cependant méconnue du public et sous-utilisée par les entreprises.
Les recommandations présentes dans le décret d’application de la loi ont-elles mis en difficulté les dirigeants des très petites entreprises (TPE) ? Lorsqu’un boucher expérimenté enseigne à un collègue la manière dont il prépare les gigots ou fait ses achats auprès d’éleveurs, s’agit-il d’une formation en situation de travail ? L’affaire est plus complexe qu’il n’y paraît.
Si une « phase réflexive » n’est pas formellement organisée, ainsi qu’une évaluation des acquis du salarié, il ne s’agit ni plus ni moins que d’une formation sur le tas, laquelle ne donne droit à aucun financement ni aucune reconnaissance. Or, comprendre ce qu’est cette « phase réflexive » n’est pas évident pour tout le monde.
Manque de connaissance de la part des pouvoirs publics du contexte dans lequel évoluent beaucoup de TPE et PME ? Il y a sans doute de cela. Ces entreprises, qui constituent la grande majorité des entreprises françaises, sont bien souvent les oubliées de la formation professionnelle et tout particulièrement les TPE dont les effectifs ne dépassent pas dix salariés. Moins de 20 % de leurs employés bénéficient de formations régulières pour quasiment 100 % des collaborateurs de grands groupes.
La loi de 2018 tentait de remédier à ces inégalités car, pour une petite structure, il est souvent plus facile de former un salarié sur place, sans interrompre complètement son activité, que de l’envoyer en stage à l’extérieur. Hélas, la réforme a fait long feu.
Le formalisme exigé pour la démarche sert en réalité les organismes de formation dont l’intervention est rendue ainsi utile à qui veut comprendre les règles du jeu. Certains de ces organismes proposent même des stages pour former et certifier les utilisateurs, alors que la loi ne l’exige pas. Une manière de garder la main.
Néanmoins le déploiement très lent de ces formations en situation de travail tient plus largement à la manière dont la formation professionnelle s’est développée et structurée en France depuis 1791, de Condorcet à la loi Delors, laquelle, en 1971, pose comme principe qu’elle doit se dérouler à l’extérieur de l’entreprise.
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